La voix

   La voix l'emporte, la berce, elle se laisse embarquer... Il est question d'eau, d'eau qui berce, d'eau qui rend la mère...
   Au gré des mots, des phrases, différentes scènes s'interposent, s'intercalent, se représentent dans son esprit qui les accueille sans résistance aucune. Il apparaît alors un fœtus qui, bien à l'abri dans ce liquide chaud, transporté tranquillement par le corps de sa mère, baigne dans la douceur, dans une sensation amortie de l'extérieur où tout est bruissement, ondes, flottement, battements de cœur...
   S'ensuit la vision du fleuve, c'est sûr qu'il s'agit du Nil, un fragile berceau tressé se déplace, porté par des vaguelettes, à travers les obstacles, pour finalement se poser dans les roseaux au bord de la rive, les pleurs de l'enfant alertent rapidement les lavandières, qui le prendront dans leurs bras accueillants...
   Ensuite la nuit, la lune éclaire le lac et s'y reflète, une barque semble voguer tranquillement sans but précis... Un homme est allongé au fond, il a tant peiné tout le jour ; fatigué il contemple les étoiles et se laisse porter par le glissement de l'eau, sensible aux clapotis discrets contre le bois, son attention se relâche, il se laisse dériver peu à peu ne contrôlant plus rien, il a déposé les rames au fond du bateau.

Maryse Bonhoure